J’avais déjà remarqué il y a un moment le travail de David Revoy, et notamment la BD « libre et open-source » Pepper & Carrot.
Récemment, suite à la parution aux éditions Glénat d’une édition papier de ces ouvrages qui, du fait de leur licence très ouverte, ne donnent lieu à aucun reversement de droits à l’auteur, des articles et commentaires assez virulents (et parfois même injurieux) ont fusé de toutes parts à propos des choix faits par David Revoy, l’idée générale étant que ces choix individuels risqueraient de fragiliser encore plus le statut déjà excessivement précaire des auteurs de BD…
Même si je suis familier avec les notions liées au Libre (certains savent peut-être que j’ai contribué, à ma modeste façon, à l’univers des logiciels libres et de GNU/Linux), je ne ferais pas quant à moi le choix de licences trop ouvertes pour mon travail de création artistique (encore que les productions de mon bot Twitter, Tartan Generator, sont sous licence CC-0), mais c’est un choix personnel, et je trouve le choix de David Revoy à cet égard tout à fait légitime et surtout respectable.
Je trouve beaucoup moins digeste, en revanche, le fait que des auteurs se soient ainsi mis à vilipender l’un des leurs comme s’il était responsable de leur propre misère. C’est, à mon avis, se tromper gravement d’ennemi, et donner raison à un système qui, depuis bien longtemps, ne sait que trop tout le profit qu’il peut tirer du principe déjà éprouvé de « diviser pour régner ». Mais je ne veux tout simplement pas, du tout, entrer dans cette polémique navrante et stérile.
Ce qui m’a sauté aux yeux, surtout, c’est qu’en lisant les pages de la BD de David Revoy, Pepper & Carrot, il était évident que son auteur devait, pour produire des images et une ambiance aussi belles, prendre vraiment plaisir à les dessiner. Je trouve ses dessins magnifiques et tout bonnement délicieux. Pour avoir, bien trop souvent, travaillé pour des gens qui me traitaient comme un moins-que-rien, et en avoir perdu la confiance, le sommeil, et la santé, je ne sais que trop à quel point le travail d’un artiste est tributaire de la façon dont il est traité. J’en ai parlé ici, déjà, plus en détail.
En résumé : je crois que quand un artiste est maltraité, en colère, privé d’espoir et de confiance, ça se voit sur ses dessins (j’en ai fait, des dessins dans ces conditions là, et je peux vous dire que je n’étais pas très fier de ce que j’avais produit). A contrario, quand il est heureux de faire ce qu’il fait parce qu’il sait qu’il travaille pour des gens qui apprécient ses efforts, qui le considèrent comme une personne et lui permettent de se sentir en confiance, eh bien ça se sent aussi dans les dessins, et ça donne, je crois, tout son sens à ce qui est, selon moi, la définition même de l’art : transmettre ces choses pour lesquelles il n’y a pas de mots.
Quand je regarde Pepper & Carrot je me dis que celui qui fait ça doit être heureux de le faire, ça se voit dans les dessins, dans les couleurs, et ça « passe » à travers l’œuvre, puisque ça rend heureux de la regarder. 🙂
Je ne porte pas de jugement sur ses choix en matière de licences légales, sur la façon dont il laisse un éditeur commercial tirer un profit unilatéral de son œuvre, etc. C’est à lui de voir, vraiment. Tout ce que je sais, c’est que manifestement ces choix lui conviennent, conviennent à son public, et, de toute évidence, conviennent à son œuvre, puisqu’elle est magnifique.
Au lieu d’émettre un jugement j’ai eu, plutôt, envie de faire le petit fan-art ci-dessus, une représentation de Pepper et Carrot à ma façon, histoire de dire bravo. Désolé pour la longue diatribe, peut-être que le petit dessin aurait suffi, mais j’avais quand même envie de m’expliquer… 😉
PS : je ne prétends pas que j’ai raison, j’ai juste émis une opinion personnelle, alors j’ai désactivé les commentaires pour ce post, parce que la vie est courte, et que je préfère dessiner plutôt que de participer à des polémiques sans fin…